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MARSIHO, CAPITALO DE PROUVÈNÇO E DE L’EMPÈRI DÓU SOULÈU !
Dins l’Armana prouvençau de 1857, Frederi Mistral, Lou Felibre de Bello-Visto, qu’avié pancaro 27 an, faguè parèisse soun tèste famous, Marsiho, que n’en vaquito d’escapouloun que mancon pas d’estrambord pèr la decano di vilo franceso de la mita dóu siècle XIXen. Poudrés pièi, tant se la causo vous agrado, i’ana sus plaço pèr ié vèire se lou pouèto vengu pus tard Prèmi Nobel de literaturo 1904 fuguè proufèto urous vo malurous...
MARSIHO SARA LA PLUS BELLO VILO DE FRANÇO
“A tèms à veni, Marsiho sara la plus bello vilo de Franço. Marsiho, la vilo dóu soulèu e de la mar, emé si dous cènt milo amo, deja passo Lioun, la vilo dóu fangas e de la nèblo. Paris, emé soun Louvre souloumbrous, emé si Téularié pourtant malur en quau li trèvo, Paris emé si lòngui carrierasso que fan desespera de vèire un bréu de champ, Paris emé si vàsti plaço clavelado de palais, mai descaladado tant de cop pèr la misèri, Paris pòu s’avisa. A bèu èstre, la pèiro, taiado e retaiado, e fustejado e’scrincelado, tóuti li mounumen, tóuti li galarié, tóuti li panteon, soun que parpello d’agasso, au respèt de la visto qu’à Nostro-Damo-de-la-Gàrdi, s’esperlongo pereilalin. La man de l’ome, es-ti poussible que luche emé la man de Diéu ? (...) Paris, tant plen de croio, en tout acò dequé pòu coumpara ? (...) Tambèn, Marsiho lou saup proun, e regardas, à l’ouro d’iuei, coume es en aio ! Ni argènt ni or que ié coste pèr s’alesti un sèti digne de soun destin. Quand venié li caud d’estiéu, l’eigage ié mancavo pèr se refresca li bouco e se lava li pèd. Mai à vint lègo d’elo passavo la Durènço, que, noun sachènt que faire de soun aigo, se bidoursavo dins sis isclo e ié fasié lingueto. Marsiho largo trento milioun à la velo, e dentre li roucas e li mounto-davalo, la Durènço vèn à la courso reverdeja soun terradou, clafi li conco de si font, e’scoubiha foro dóu port lou queitivié de si carriero. Marsiho avié pèr Bourso un vièi cabanas de post que fasié ’scorno à sa Canebiero. Qu’a fa ? D’un cop de tiblo a neteja sa Canebiero de tout un pelagnas d’oustau, e’no bastisso magnefico, en l’ounour de Plutus, bandis en l’èr soun frountoun courintian. Dins soun vièi port, douge-cènt bastimen se i’abrigon à l’aise. Aqui dedins pamens s’èi trouvado restrencho, e veici qu’un bèu matin, a cava long de sa costo un segound port enca plus bèu, aquéu de la Joulieto, que quatre milo navire podon se i’amarra. Vous imaginas bessai aro que pèr amaga soun negòci aura de relarg de soubro ! Parèis que noun, car pas plus tard que l’an passa, davans lou ribeirés d’Aren, a mai dubert un autre port : lou port Napoleon. Mai aro, bon ! Marsiho a pèr manja, pèr béure ; mai fau bèn que se vestigue e se pimpare à soun degu, e veici qu’uno lèi dóu 10 de Jun 1854 ié baio plen poudé de se bouta dessus cènt milioun en de beloio...
SE PARIS AVIÉ ’NO CANEBIERO, SARIÉ ’N PICHOUN MARSIHO !
Ah ! peréu, quau vèi Marsiho vuei e que lou veira dins dès an, lou veira bèn dous cop ! Imaginas-vous que van rasa la vilo vièio ; tout de long de la mar ié van basti à perdo de visto uno renguiero de palais en fino pèiro de Fontvièio, que li marin, de liuen, en arribant sus l’aigo, creiran de vèire Babilouno ! - ié van basti de caserno mai que bello ; ié van basti de vàsti magasin publi pèr descarga e’ntrepausa li marchandiso ; ié van basti d’espitau que sara’n plesi de i’èstre ; ié van basti d’escolo emperialo ; ié van basti uno catedralo ; van rebasti Nostro-Damo-dela- Gàrdi… Eh ! quau lou saup tout ce que van basti. Es pèr vous dire, en un mot coume en cènt, que Marsiho, à tard o tèms, fara peta Paris, e qu’un jour, degun se trufara dóu Marsihés quand dira : Se Paris avié ’no Canebiero, sarié ’n pichoun Marsiho ! ”
Segur, 160 an après, Marsiho a pas encaro fa peta Paris... Pamens i’a plus degun pèr se trufa seriousamen d’aquelo bello vilo despièi qu’an coumença lou chantié grandaras d’Euromed, coume dison, pèr prene qu’un soulet eisèmple. Car coume que vague, Marsiho «tèn la mar, e navigo alucrido» dins un mounde boulegadis que ié fau de longo faire sa plaço. Alor anen tóuti faire viéure lou cor d’aquesto noblo ciéuta, en ié zounzounejant uno cansoun de Scotto, Darbon, Gui Bonnet, Crous e Pielo, Massilia Sound System, Lo Cor de la Plana vo enca d’IAM, Soprano, Patri Fiori, vo de qu voudrés fin-finalo... tant que vous farés plesi !
Jan-Miquèu Turc
Proufessour certifica de lingo prouvençalo
Majourau dóu Felibrige
TRADUCTION
MARSEILLE, CAPITALE DE PROVENCE ET DE L'EMPIRE DU SOLEIL !
Dans l'Almanach provençal de 1857, Frédéric Mistral, Le Félibre de Belle-Vue, qui n'avait pas encore 27 ans, fit paraître son célèbre texte, Marseille, dont voici les principaux extraits plein d'enthousiasme à l'égard de la doyenne des villes françaises du milieu du XIXe siècle. Vous pourrez ensuite, si cela vous fait plaisir, vous y rendre pour constater sur place si le poète, devenu plus tard Prix Nobel de littérature 1904, fut prophète heureux ou malheureux... "Dans les temps futurs, Marseille sera la plus belle ville de France. Marseille, la ville du soleil et de la mer, avec ses deux cent mille âmes, déjà dépasse Lyon, la ville du bourbier et du brouillard. Paris, avec son Louvre sombre, avec ses Tuileries portant malheur à ceux qui les fréquentent, Paris avec ses longues et grandes rues qui font désespérer de voir un bout de champ, Paris avec ses vastes places jonchées de palais mais tant de fois dégradés par la misère, Paris peut prendre garde. La pierre a beau être taillée et retaillée, et retravaillée et ciselée, tous les monuments, toutes les galeries, tous les panthéons, ne sont rien du tout vis-à-vis du panorama de Notre-Dame-de-la-Garde qui se prolonge à perte de vue. La main de l'homme serait-elle capable d'égaler celle de Dieu ? (...) Paris, si orgueilleuse, que peut-elle offrir en comparaison ? (...)
Cependant, Marseille le sait assez, et regardez, maintenant, comme elle est en constante activité ! Ni argent ni or qui ne lui coûte pour se préparer un trône digne de son destin. Quand venaient les chaleurs de l'été, l'eau lui manquait pour se rafraîchir les lèvres et se laver les pieds. Mais à vingt lieues d'elle passait la Durance, qui, ne sachant vraiment pas que faire de son eau, se tortillait dans ses îles et lui faisait envie. Marseille verse avec largesse trente millions au projet, et d'entre les rochers et les terrains montueux, la Durance vient en courant reverdir son territoire, remplir les conques de ses fontaines, et balayer hors de son port la saleté de ses rues. Marseille avait pour sa Bourse une vieille cabane délabrée en planches qui faisait honte à la Canebière. Qu'a-t-elle fait ? D'un coup de truelle elle a nettoyé sa Canebière d'une vaste étendue de maisons, et une bâtisse magnifique, en l'honneur de Plutus, élance vers le ciel son fronton corinthien. Dans son vieux port, douze cents bâtiments s'abritent à l'aise. Là-dedans cependant elle s'est trouvée à l'étroit, et voici qu'un beau matin, elle a creusé le long de sa côte un second port encore plus beau, celui de la Joliette, où quatre mille navires peuvent s'amarrer.
Vous imaginez peut-être maintenant que pour abriter son négoce elle aura des places de reste ! Il paraît que non, car pas plus tard que l'an passé, devant le rivage d'Arenc, elle a de nouveau ouvert un port : le port Napoléon. Mais maintenant, bon ! Marseille a de quoi manger et boire ; mais il faut bien qu'elle se vête et qu'elle se pare convenablement, et voici qu'une loi du 10 juin 1854 lui donne pleins pouvoirs pour se couvrir pour cent millions d'ornements... Ah ! aussi, qui voit Marseille aujourd'hui et qui la verra dans dix ans, ne la reconnaîtra pas ! Imaginez-vous que la vieille ville va être rasée ; tout le long de la mer va se construire à perte de vue une rangée de palais en fine pierre de Fontvieille, queles marins, en arrivant par la mer, predront pour Babylone ! - on va bâtir des casernes très belles ; on va bâtir de vastes magasins publics pour décharger et entreposer les marchandises ; on va bâtir des hôpitaux où il fera plaisir d'y être ; on va bâtir des écoles impériales ; on va bâtir une cathédrale ; on va rebâtir Notre-Dame-de-la-Garde…. Eh ! Qui sait tout ce que l'on va bâtir ! C'est pour vous dire, en un mot comme en cent, que Marseille, tôt ou tard, dépassera Paris, et qu'un jour, personne ne se moquera du Marseillais quand il dira :
Si Paris avait une Canebière, ce serait un petit Marseille !
"Certes, 160 ans après, Marseille n'a pas encore détrôné Paris... Pourtant, plus personne ne se moque sérieusement de cette belle ville depuis qu'a commencé le chantier titanesque d'Euromed, comme on dit, pour ne prendre qu'un seul exemple. Car, quoi qu'il en soit, Marseille "tient la mer, et navigue âpre au gain" dans un monde en mouvement dans lequel il faut sans cesse trouver sa place. Alors allons tous faire vivre le coeur de cette noble cité, en y fredonnant une chanson de Scotto, Darbon, Guy Bonnet, Crous e Pielo, Massilia Sound System, Cor de la Plana ou encore d'IAM, Soprano, Patrick Fiori, ou de qui vous voudrez en fin de compte... tant que vous vous ferez plaisir !
Jean-Michel TURC
Professeur certifié de langue provençale
(Académie d'Aix-Marseille)
VA SABIAS ACÒ ?
Frederi Mistral alarguè sa dicho bèn famoue, Lou Felibrige e l’Empèri dóu Soulèu, lou 25 de nouvèmbre de 1882, au Ciéucle artisti de Marsiho, qu’es aro lou Licèu Montgrand. N’en vaquito quàuquei troue que poudès liegi sus la lauso quihado sus la paret dóu Licèu Montgrand, carriero dóu mume noum, pròchi la Prafeituro. Es dounc aquito que Mistral “dins uno counferènci memourablo” li parlè de Marsiho coumo de la Capitalo de l’Empèri dóu soulèu, valènt-à-dire de l’argue latin. “La vilo de Marsiho emé si tres milo an de glòri, si vàsti port ounte li pavaioun de tóuti li nacioun se tocon e freirejon, emé soun gou meravihous que sèmblo lou mirau de la velo latino, Marsiho es apelado à deveni lou liame, lou fougau de la Latineta e la Capitalo de l’Empèri dóu Soulèu.”
LE SAVIEZ-VOUS ?
Frédéric Mistral prononça son célèbre discours, Le Félibrige et l'Empire du Soleil, le 25 novembre 1882, au Cercle artistique de Marseille, aujourd'hui devenu le Lycée Montgrand. En voici quelques extraits que vous pouvez lire sur la plaque située sur le mur du lycée Montgrand, rue du même nom, proche de la Préfecture. C'est donc dans ce là que Mistral "dans une conférence mémorable" parla de Marseille comme de la Capitale de l'Empire du soleil, c'est-à-dire de l'arc latin.
" La ville de Marseille, avec ses trois mille ans de gloire, ses vastes ports où les pavillons de toutes les nations voisinent fraternellement avec son golfe merveilleux qui rappelle le miroir de la voile latine, Marseille est amenée à devenir le lien, le foyer de la latinité et la capitale de l'Empire de soleil ".
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