Conseil départemental des Bouches-du-Rhône

Les salins, une histoire qui ne manque pas de sel !

La Méditerranée est un grenier à sel qu’ont su exploiter Grecs et Romains.
Aux Salins-de-Giraud, l’histoire commence au 19e siècle avec un certain Henri Merle qui va investir 4 millions de francs pour l’exploitation de vastes étangs salés. Une histoire encore en marche...

Ce matin d’hiver rugueux, la neige est tombée à Presles. Dans ce petit village du Vercors, le préposé au salage ne se doute pas qu’il utilise du sel qui vient...de Camargue. La mer au secours de la montagne par la magie de ce petit grain qui aura fait beaucoup de chemin. Pour comprendre comment il en est arrivé là, revenons un an en arrière.

 

50 MILLIONS DE M3 D’EAU DE MER

Nous sommes au mois de mars aux Salins-de-Giraud. Plus précisément au petit port du Grau de la dent. Patrick, chef d’équipe aux Salins, mesure la densité : 29 g de sel par litre. C’est parfait ! Le signal pour ces saliniers d’ouvrir les 3 martelières séparant la mer des étangs. C’est le coup d’envoi de 7 mois intenses d’une lente transformation de l’eau en sel. Près de 50 millions de m3 d’eau de mer vont subir sur 60 kilomètres et 7 000 hectares une véritable cure d’amaigrissement. D’abord poussée par des pompes pouvant débiter 7 560 m3/heure, l’eau va dans un premier temps être stockée dans des étangs.
 

120 KILOMÈTRES PAR JOUR POUR UN SAUNIER

C’est alors que le temps fait son œuvre, en commençant le processus d’évaporation de l’eau afin de concentrer le sel au maximum. Le travail des sauniers va permettre de passer d’un étang à un autre, par gravité ou par l’utilisation de pompes, en ouvrant d’un côté et en fermant de l’autre, l’œil rivé sur la hauteur d’eau, la densité de sel, et... la météo ! Le vent et la pluie sont les moteurs ou les freins naturels de cette gestation saline. Un bon vent va faire circuler l’eau, un mauvais orage va fournir trop d’eau douce. Ouvrir, fermer, réguler, un saunier parcourt près de 120 kilomètres par jour.
 

260 GRAMMES, LE SEUIL PARFAIT !

C’est très exactement à 260 g par litre qu’enfin le sel va pouvoir se déposer. Il est alors entreposé dans les 345 hectares répartis en 25 cristallisoirs où il termine son chemin pour ensuite être récolté. Si en 1855, du temps d’Henri Merle, on raclait le fond constitué de terre, aujourd’hui le procédé est plus technique et étudié. Sous la couche de sel, il y a en permanence... une autre couche de sel, compacte et très dure, de 20 centimètres d'épaisseur. La récolte est plus facile. Ce sel qui serait propre à la consommation après avoir été nettoyé, va emprunter les barges pour remonter le Rhône et terminer sur les routes enneigées.
 

JACQUEMUS ET... VICTORIA BECKHAM, ÉGÉRIES DU SEL ?

Mais le petit grain blanc peut être aussi source d’inspiration. En juin 2022, le créateur Simon Porte Jacquemus qui a grandi à Mallemort, choisit le décor lunaire des camelles (montagnes de sel hautes de 20 mètres) pour présenter sa collection automne-hiver. Tels des héros de Mad Max, les mannequins défilent sous l’œil admiratif de la créatrice de mode (et ex chanteuse) Victoria Beckham.

Aujourd’hui, les Salins-de-Giraud produisent 450 000 tonnes de sel par an. Il fût une époque où c’était le plus gros salin d’Europe avec 1 million de tonnes annuel. En 2007, de vastes travaux entrepris par la société des Salins ont permis de préserver une activité en danger et surtout de maintenir un métier ancestral. Pour former un saunier, il n’y a pas d’autre école que celle de l’apprentissage par un ancien. Cela nécessite deux ans de compagnonnage. En espérant qu’il neige encore d’ici là...

LA FLEUR DE SEL, LE CAVIAR DE LA MER

Si la fleur de sel est si convoitée, c’est qu’elle constitue la pureté incarnée. Ramassée à la main, elle est la résultante d’un processus très rapide. Au cours d’une nuit fraîche, le sel se met en suspension et constitue de petites plaques qui, poussées par le vent, se retrouvent sur les bords des étangs le matin. Ne se cristallisant pas, il est très fin et particulièrement pur. Son ramassage à la main et son goût incomparable en font un produit très recherché.

POURQUOI LES FLAMANTS SONT ROSES ?

C’est le cliché que tout le monde recherche : photographier le rose d’un étang salé au coucher de soleil. Ce processus naturel est en fait dû à la présence une micro algue : la Dunaliella salina qui se développe par forte salinité. Riche en caroténoïdes (colorant naturel), elle est consommée par les crevettes (les artemias) qui elles-mêmes sont mangées par... les flamants. L’ingestion de ces crustacés est donc à l’origine de leur couleur rose. Les Salins sont une formidable réserve pour les 240 espèces d’oiseaux qui y nichent, dont 103 sont protégées.