À l'assaut de la face cachée du Concors
Versant Peyrolles
De l'ombre des vallons jusqu'aux délicates crêtes, dans l'infini dédale des collines, l'approche surprenante du sommet respecté se résume en un mot : l'aventure.
On va marcher plus avant, tout de suite dans la pierraille s'entrechoquant sous les semelles. La cadence désordonnée des pas le dispute à l'étonnement de se retrouver ici, dans ces collines vierges vêtues d'un sous-bois harmonieux. C'est vrai qu'arriver jusque-là ne fut pas une mince affaire.
Le plus simple finalement, ce fut de prendre la Route de Trempasse à partir du premier pont que l'on rencontre sur le Chemin du Canal lorsque l'on vient de la départementale qui relie Peyrolles à Jouques. Après, il aura suffi de longer le parc de Regagnade et de filer sur un petit chemin vicinal finissant en piste et cela jusqu'à la grande esplanade située en dessous de la barrière DFCI. Et maintenant nous y. sommes, à pied, au coeur d'un univers végétal palpitant de vie animale.
Des frondaisons semblables à des moucharabiehs
Le vallon parait s'enfoncer dans un dédale forestier encore indéchiffrable. Du ciel, on n'en voit qu'un bout et les frondaisons filtrant la lumière s'élancent partout tels des moucharabiehs naturels. Le chêne, ici dominant qu'il soit vert ou pubescent, s'épanouit superbement dans ces encaissements. Il est escorté de buissons, de fougères... L'ensemble coloré exhale de fortes odeurs mâtinées de senteurs de bonne terre humide. Ce tableau olfactif est rehaussé par la vision de tapis de toutes formes faits de mousse et dont certains épousent parfaitement le replat de grands blocs descendus là des hauteurs
depuis on ne sait combien de temps. Enfin surgit une clairière côtoyant une petite ruine ! C'est ici que commence l'ascension, la vraie. C'est ici aussi qu'éclatent les premières vues d'ensemble permettant de mieux se repérer. A main droite, la piste s'enfuit au loin. A main gauche, à partir de la clairière même, un étroit sentier part à l'assaut du sommet. On le voit d'ailleurs, le Concors, crêtes élancées, falaises courtes haut perchées en forme de mâchoire de pierre lui donnant des allures de mastodonte. Changement de rythme, changement de décors. Le dénivelé s'affirme. L'environnement devient plus intime. Ménageons notre souffle et profitons de petits ralentissements pour se délecter des merveilles naturelles alentour...
Un rond de ciel dans le calcaire
Proche, très proche, la végétation s'empare du sentier. De pas en pas on prend de la hauteur et du plaisir à marcher dans cet univers insolite. Voilà, sur la gauche, les vestiges d'un petit jas, du moins quelques simples pierres assemblées témoignant d'un savoir séculaire. Fiers pans de murs de pierres sèches encore majestueux malgré la décrépitude dans laquelle les a plongés l'abandon... Le sentier, lui, s'enhardit gaillardement. ça monte bien et l'on dépasse le faîte des plus hautes collines alentour. À tel point qu'au hasard d'un belvédère de fortune on aperçoit déjà, au sud, l'élancement longiligne de Sainte-Victoire et à l'ouest, le tombant du Luberon dans la plaine de Durance. Puis soudain, de l'autre côté, la tête du Concors se dessine plus précisément.
On atteint comme un petit col. Sublime spectacle ! Au loin la Vautubière apparaît en premier plan, verte découpe sur les sommets blancs des Alpes. Quant au sentier, il repart sur la droite, croisant au passage une petite borne romaine. Tout de suite il faut enchaîner : un raidillon et puis un deuxième, sans moment de répit ou presque. Au beau milieu d'un effort méritoire, le sentier se sépare en deux. À main gauche, encore quelques mètres bien pentus, puis la falaise, blanche éclatante... S'en approcher, la toucher, puis se hisser encore un peu à même la pierre... Et voilà, c'est ici, la Baou Traouca, le rocher troué, un rond de ciel et de paysages dans le compact du calcaire. Maintenant, le sommet est tout proche, mais il faut encore longer la falaise, affronter un ultime raidillon. Au final : on émerge à plus de 600 mètres d'altitude, non loin d'une croix de bois. Le Concors mérite amplement sa réputation de sérieuse petite montagne. Et là-haut les espaces propices au piquenique avec vue en prime ne manquent pas. La descente ? Sportive et grisante, jusqu'à la voiture avant que de rallier Peyrolles village.
Ancienne cité médiévale Gros bourg paysan, Peyrolles présente encore le contour d'une ancienne citémédiévale. En vedettes, un imposant beffroi et son campanile qui annoncent un dédale de ruelles au centre desquelles s'élève le château dit du Roi René. Il appartint en effet à ce dernier puis à Charles III et à Louis XI. Remanié jusqu'à prendre l'aspect d'une demeure du XVIIe siècle, il est aujourd'hui classé et abrite les bâtiments municipaux. Sous l'ensemble, on a découvert une grotte unique en Europe renfermant des fossilisations de palmiers
datant de 6,5 millions d'années. De l'autre côté de la route principale, dite des Alpes, la chapelle Saint-Sépulcre, construite sur un promontoire rocheux, propose aux regards curieux sa forme originale, quadrilobée, c'est à dire à quatre nefs disposées en forme de croix et que l'on dit d'inspiration orientale. Enfin, le village s'enorgueillit d'un circuit des oratoires dont le plus ancien, datant de 1481, est également le plus vieux de Provence.
Paul Teisseire
PRATIQUE - Comment Y aller ?
Après Meyrargues, Peyrolles est situé sur la “route des Alpes” qui relie Aix-en-Provence au Pont Mirabeau. On peut aussi y accéder par l'autoroute A51, sortie Meyrargues.