Pour améliorer la qualité de l’air sur le littoral, le Département et le Port de Marseille s’associent pour équiper les quais en infrastructures électriques destinées à limiter la pollution des navires en escale.
Alors que les données sur la pollution émise par les navires en escale dans les ports méditerranéens sont préoccupantes, le Département et le Grand Port Maritime de Marseille agissent de concert pour limiter les émissions polluantes (soufre, particules fines, oxyde d’azote) des navires à quai.
L’ÉLECTRIFICATION DES QUAIS À GRANDE ÉCHELLE
L’une des opérations phares consiste à brancher les navires en escale au réseau électrique terrestre haute tension. Cette mesure, déjà mise en oeuvre par la compagnie marseillaise La Méridionale (lire ci-contre), permet aux bateaux amarrés de longues heures, de stopper leurs moteurs tout en continuant à être alimentés en électricité à bord. En escale, un navire a en effet besoin de l’équivalent de la consommation en électricité de 300 logements. Seul un réseau électrique haute tension peut fournir la puissance requise. Le Département aide donc le Port de Marseille à s’équiper en installations électriques en finançant 40 % des 15 millions d’euros nécessaires à l’électrification à grande échelle des différents quais.
DES NAVIRES BRANCHÉS
Les travaux sont déjà bien avancés avec le branchement en cours des navires de Corsica Linea basés Quai du Maroc. Et à partir de 2021, suivra la connexion pour les ferries Maghreb regroupés en escale au Cap Janet et les navires en réparation navale industrielle. Objectif : l’alimentation électrique de la totalité des ferries internationaux et des navires en réparation d’ici 2023.
LES TRANSPORTS EN COMMUN PASSENT AUSSI AU VERT
À la rentrée, 15 véhicules 100 % électriques assureront la desserte des 19 stations de la nouvelle ligne de Bus à haut niveau de service (BHNS) : L’Aixpress. Financée par le Département et la Métropole, cette nouvelle offre de transport plus écologique reliera le nord-ouest au sud-est d’Aix-en-Provence, en passant par le centre, en seulement 25 minutes.
À Marseille, les lignes de bus 100 % électriques se développent également. La Métropole, avec le soutien du Département à hauteur de 50 %, se dote de 15 bus 100 % électriques pour la RTM.
Et sur la ligne interurbaine Aix-Marseille, la plus fréquentée de France, pour faire face à l’explosion de la demande, 6 nouveaux cars à double étage viendront étoffer la flotte de 10 cars à double étage déjà mis en service en 2018. Financés à 70 % par le Département, ces véhicules transportent 92 voyageurs contre 55 dans un autocar standard, avec des amplitudes horaires élargies, des fréquences cadencées et une ligne directe sans arrêt. Sans compter qu’ils empruntent 7 kilomètres de voies en site propre sur l’A7 et sur l’A51. Ces tronçons réservés exclusivement aux autocars sont voués à se développer entre Aix et Marseille.
Marc Reverchon : "Une solution exemplaire"
Vous avez été précurseur dans la connexion électrique des navires à quai. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
Marc Reverchon : Depuis janvier 2017, nous utilisons cette solution pour les trois navires de notre flotte en escale à Marseille. Avec des bateaux qui font des rotations quotidiennes entre la Corse et Marseille, amarrés en plein centre-ville, nous avons pris conscience très tôt que nous avions une responsabilité environnementale. Cet équipement en développement sur le Port de Marseille est encore peu répandu dans le monde. En Méditerranée, seul Marseille l’expérimente.
C’est une solution exemplaire. À quai, elle supprime tout rejet : co2, oxyde de soufre, d’azote et particules fines. Et évite les nuisances sonores car les moteurs sont désormais à l’arrêt pendant les escales. C’est bon pour les riverains et pour les équipages à bord qui travaillent dans de meilleures conditions. Cette mesure recueille également l’adhésion des passagers.
Sur le plan économique, cela demande-t-il de gros investissements ?
M. R. : Oui. Des armateurs comme des gestionnaires de ports. Pour des navires en escale quotidienne à Marseille, l’équation économique est plus simple, car les investissements sont amortis. Les ferries sont bien adaptés à la connexion électrique, c’est l’une des meilleures réponses environnementales. La connexion de nos trois navires a nécessité un investissement de 5 millions d’euros : 3,1 millions d’euros à notre charge, 1,5 million d’euros pour le Grand Port Maritime et 480 000 euros d’aides publiques. Donc quand le Département s’associe au port de Marseille à hauteur de 40 %, c’est très incitatif.
On ne peut plus continuer comme ça.
Les armateurs en ont conscience
Cette solution est-elle suffisante ?
M. R. : Elle n’est pas transposable à tous les navires. Il faut des mesures au cas par cas pour lutter contre la pollution maritime. Depuis peu, le port de Marseille accueille chaque semaine le premier paquebot au monde fonctionnant au Gaz naturel liquéfié (GNL), sans soufre ni particules fines.
Et on sait que dans les prochaines années, on passera progressivement à l’hydrogène. On avance, les armateurs ont pris conscience qu’on ne peut plus continuer comme ça ! Il faut viser le mix énergétique entre carburant sans soufre du type GNL ou méthanol, filtre à particules, scrubber (lavage des fumées), électrification ou alimentation mobile en groupe électrogène au GNL.
L’innovation environnementale est-elle au coeur des enjeux du transport maritime de demain ?
M. R. : Oui et elle doit être soutenue par les pouvoirs publics. À titre d’exemple, nous avons mis au point avec le chimiste Solvay et la société autrichienne Andritz un filtre à particules qui supprime les particules fines et le soufre lors de la navigation, une technologie déjà utilisée dans les usines d’incinération.
Nous essayons de voir si ce qui marche sur terre fonctionne en mer. Nous avons déjà équipé un de nos navires de cette technologie avec des résultats très prometteurs. Nous visons la certification pour équiper prochainement un deuxième navire. C’est une première mondiale.